Créateur d’une start-up ou bien dirigeant d’une entreprise innovante, vous envisagez de lever des fonds pour accélérer votre développement commercial, réorganiser votre capital, et assurer la pérennité financière et économique de votre entreprise.
La levée de fonds représente une solution de financement de plus en plus sollicitée par les associés fondateurs. Cette opération requiert au préalable conseils et préparation.
En tant que fondateur, il est essentiel de répondre à quelques questions stratégiques :
- Quel type d’investisseurs faire rentrer dans votre capital ?
- Comment gérer la relation de travail avec ce nouveau partenaire ?
- Comment éviter ou sortir des conflits survenus avec ce dernier ?
Vous planifiez de lancer un premier tour de table ? Notre dossier thématique répond aux craintes et préoccupations partagées par les associés fondateurs d’une entreprise, avant le lancement d’une levée de fonds.
I – En quoi consiste une levée de fonds ?
Une levée de fonds (Fundraising, en anglais) est un acte par lequel une entreprise reçoit un investissement en fond propres (ou quasi fond-propres) de la part d’un ou plusieurs investisseurs. Il s’agit donc d’une source de financement alternative à celle qui consiste à faire appel à un organisme bancaire.
En contrepartie de leur contribution financière, les investisseurs reçoivent des actions et/ou d’autres valeurs mobilières (telles que des obligations, obligations convertibles, BSA Ratchet), ainsi que certains droits concernant la gestion de l’entreprise et l’évolution de son actionnariat.
Côté investisseurs, l’intérêt premier de l’opération consiste à générer un retour sur investissement par la vente future de leur participation dans l’entreprise. Le retour sur investissement estimé, tout comme leur sortie de la société, doivent être au préalable négociés et organisés.
Côté entrepreneurs, la levée de fonds va permettre de déployer les moyens nécessaires pour effectuer de la R&D dans la perspective d’un lancement de produit, développer la stratégie commerciale, et stabiliser la situation financière et économique de la société sur le moyen/long terme. Le financement ainsi accordé – sous forme de capital (actions) ou quasi-capital (obligations convertibles) représente un risque moindre par rapport au financement bancaire.
II – Levée de fonds : qui faire entrer dans son capital ?
Faire entrer un ou plusieurs investisseurs dans le capital d’une société est une opération délicate, qui va conditionner le bon développement de votre projet d’entreprise.
Qui faire entrer dans votre capital ? Quel type d’investisseurs faut-il attirer pour réussir cette future levée de fonds ?
A – Attirer des investisseurs en phase avec votre entreprise et votre projet
Le niveau de maturité de l’entreprise, la nature du projet, et la valeur de la levée de fonds sont quelques uns des paramètres qui orientent le fondateur vers un certain type d’investisseurs.
Il faut ici évoquer deux notions essentielles en matière de levée de fonds : le capital amorçage, et le capital développement.
Le Capital amorçage :
Le capital amorçage fait partie intégrante du capital-risque ; il représente le premier apport en capital d’une jeune entreprise en plein essor. Il s’agit donc d’un investissement en fonds-propres, minoritaire et temporaire, qui permet de financer le lancement d’une jeune société. Le capital amorçage va notamment permettre d’amortir les frais antérieurs à la mise sur le marché du premier produit ou service de la société.
La levée de fonds représente dans ce cas de figure le “premier tour de table” ; le capital s’ouvre alors le plus souvent à des investisseurs physiques, dont la valeur des investissements oscillent entre quelques milliers à quelques centaines de milliers d’euros selon le niveau de développement de l’entreprise.
On distingue deux profils types d’investisseurs dans le cadre du Capital amorçage :
– Le Love money : il s’agit des parents, frères et soeurs, amis proches (etc…), qui entrent dans le capital (essentiellement) en raison du lien affectif qui les lie aux fondateurs de la société.
– Le Business angel : il s’agit d’une personne physique qui investit une partie de son argent dans une entreprise innovante dont le potentiel est tangible. La prise de participation est dans ce cas minoritaire.
Les fonds d’amorçage et le capital-risque interviennent généralement en second lieu, après le Love money et les Business angels.
Les fonds considérés ne proviennent plus exclusivement de personnes physiques, et sont alors gérés par des professionnels.
La phase du Capital-risque va permettre de soulever les questions liées à la valeur de l’entreprise, et la répartition de celle-ci entre les fondateurs et les investisseurs.
Le capital Développement :
Les fonds de capital développement permettent de financer des entreprises plus matures, qui bénéficient d’une croissance forte et d’une rentabilité élevée. La levée de fonds va permettre à ces sociétés d’accueillir des financements de grande envergure, afin de favoriser leur croissance, encourager des projets d’innovation, soutenir leur développement commercial, ou encore disposer d’un partenaire dans l’acquisition d’activités complémentaires.
B – Savoir définir et exprimer ses besoins en tant que fondateur
La réussite de la levée de fonds dépendra de l’adéquation entre le profil de l’investisseur et les attentes exprimées par les fondateurs.
Il est essentiel d’identifier vos besoins effectifs en matière de développement de l’entreprise, et le type de partenariat que vous souhaitez engager avec votre futur co-actionnaire :
- Besoin en fonds propres uniquement : dans ce cadre, l’investisseur endosse le rôle de simple soutien financier, ce qui sous-entend une implication limitée dans la stratégie de l’entreprise. Son champ d’intervention est restreint à la sphère financière.
- Accompagnement stratégique : ici, le rôle de l’investisseur dépasse celui du simple pourvoyeur financier. Ces co-actionnaires se révèlent de véritables soutiens stratégiques pour les associés fondateurs.
- Gain en notoriété : certains investisseurs professionnels peuvent vous faire bénéficier d’un gain en notoriété, et/ou créer des passerelles avec des partenaires fournisseurs ou des clients importants.
Cette base de réflexion vous conduira vers des profils d’investisseurs dont les ambitions correspondent à vos besoins propres, vous évitant ainsi d’éventuelles désillusions et déconvenues.
III – Organiser l’arrivée et la sortie des investisseurs
Une levée de fonds correctement menée comporte des étapes obligatoires et incontournables : les négociations, l’accord final, la gestion au quotidien, et la sortie des investisseurs.
A – Fondateur et Investisseur : instaurer une relation de travail nouvelle
La relation entre l’entrepreneur et l’investisseur varie selon la nature de ce dernier. Certains grands principes demeurent néanmoins similaires, que l’investisseur soit un Love money, un Business angel, ou bien un fonds d’investissement.
Afin que la relation entre l’entrepreneur et l’investisseur demeure saine et vertueuse, il est nécessaire de respecter certaines règles assimilables à la notion de “vivre ensemble”.
Concrètement, l’investisseur n’intervient pas dans la gestion courante de la société, et demeure dans la grande majorité des cas actionnaire minoritaire.
Néanmoins, nous l’avons plus haut, certains ne s’attendent pas à être considérés comme de simples pourvoyeurs financiers, préférant se positionner en tant que partenaires et soutiens privilégiés de l’entrepreneur. Ce dernier pouvant légitimement faire part à ses nouveaux partenaires de ses difficultés de gestion et attendre des conseils avisés et empreints de neutralité.
B – Le Pacte d’associés
Non obligatoire mais vivement conseillée, la rédaction du Pacte d’associés va permettre la formalisation des différents intérêts en présence.
Ce pacte prévoit notamment la rédaction des clauses de sortie, la formalisation de règles en matière de communication (en précisant les informations stratégiques à transmettre aux investisseurs à échéance régulière), la mise en place de comité stratégique avec compétences et règles de fonctionnement à définir, et enfin les règles en cas de conflits. Le pacte d’associés servira ainsi à prévoir des solutions concrètes pour sortir du conflit. Il pourra par exemple prévoir de définir quel investisseur devra sortir du capital, inclure une éventuelle promesse de vente des titres, et prévoir des règles de solution amiable des conflit.
C – Anticiper la sortie des investisseurs
Lorsqu’ils entrent au capital d’une société, les investisseurs ont en tête de générer une plus-value, et ce le plus rapidement possible. La sortie de l’investisseur, ou désinvestissement, représente un élément clé des phases de négociations qui précèdent la levée effective des fonds.
Car si au moment de l’entrée au capital, les intérêts entre fondateurs et investisseurs étaient communs, les aspirations de chacun peuvent diverger au moment de la sortie. D’où l’intérêt de profiter d’un contexte favorable pour anticiper le départ des investisseurs.
Concrètement, la sortie des investisseurs se fera dans l’un des contextes suivants :
- L’introduction en bourse ou IPO (Initial Public Offering) : votre société entre en bourse et les actions sont achetées par des porteurs de fonds d’investissement.
- La rotation d’investisseurs ou LBO (leverage buy out) : un investisseur part, et un ou plusieurs le remplacent via la création d’une holding.
- La revente de gré à gré : les titres sont revendus à l’exploitant associé historique.
- La revente de l’intégralité du capital à un tiers
- La réduction de capital : la société rachète ses propres titres pour ensuite les annuler.
- Le décès prématuré du dirigeant exploitant
- Le dépôt de bilan avec liquidation judiciaire
Les temps de rotation des investisseurs sont en moyenne de 3 ans pour une start-up, et de 6 à 7 ans pour une entreprise classique.
Comment négocier sereinement la sortie des investisseurs ?
Nous l’avons évoqué plus haut, le moyen le plus couramment utilisé pour anticiper la sortie des investisseurs est la rédaction de clauses dédiées dans le Pacte d’associés.
Concrètement, vous pourrez être amenés à formaliser les éléments suivants :
- Mentionner officiellement l’échéance à laquelle l’investisseur souhaite sortir du capital.
- Définir la méthode de calcul de la valeur des actions au moment de la sortie
- Mentionner la sortie favorite, comme une introduction en bourse, ou bien introduire une clause de préférence au profit du fondateur.
- Intégrer des clauses garantissant que la sortie aura bien lieu à l’échéance prévue.
IV – Éviter les conflits entre entrepreneurs et investisseurs
La relation entre un entrepreneur et son investisseur doit respecter certaines valeurs clés : loyauté, constance, et confiance sont les garants d’une collaboration profitable entre ces deux acteurs.
Faire entrer un ou plusieurs investisseurs dans le capital d’une entreprise engage les associés fondateurs à communiquer à échéance régulière sur un certains nombres de points définis lors de la signature de la Levée de fonds.
Tous deux tournés vers l’intérêt de l’entreprise, le fondateur et l’investisseur doivent ainsi engager une relation de travail basée sur la transparence.
De bonnes relations avec l’investisseur conditionneront entre autres la capacité des deux parties à prendre des décisions difficiles, à faire des concessions, quitte à nier certains intérêt individuels immédiats.
Rester à l’écoute des attentes et craintes des investisseurs
Une des craintes souvent partagées par les investisseurs réside dans le non emploi des fonds collectés pour le projet initialement défini. Afin d’éviter la survenue d’éventuels conflits et malentendus, n’envisagez jamais la modification du business modèle sans validation préalable de votre investisseur.
Favoriser la communication entre les deux parties
Un chef d’entreprise doit favoriser les échanges avec ses investisseurs, et ce de façon régulière. En faisant preuve d’ouverture et de transparence, l’entrepreneur a toutes les chances de gagner la confiance de ses investisseurs, les érigeant ainsi au rang de véritables partenaires. Le fondateur peut accepter de diffuser des informations en supplément du minimum légal prévu par la loi, dans le cadre de l’assemblée générale statuant sur les comptes.
Au delà de ce rendez-vous annuel, fondateurs et investisseurs peuvent échanger sur l’avancée des projets lors de rendez-vous téléphoniques, déjeuners informels et autres comités de direction qui sont autant d’occasions de faire le bilan sur la performance actuelle de l’entreprise, et sur les perspectives d’évolution à court et moyen terme de son projet.
Ne pas nier le conflit
Le litige naît souvent de la perte de confiance de l’investisseur dans le projet de l’entreprise et/ou le fondateur. Dans ce cas, une erreur parfois commise par les fondateurs consiste à minimiser, voire nier le conflit. La meilleure façon d’endiguer les éventuels différends survenus avec votre investisseur consiste à faire preuve d’écoute, de bonne volonté et de transparence à son égard. Cette communication avec l’investisseur évitera également une propagation de la défiance d’un seul investisseur.
Proposez-leur de les rencontrer de façon informelle afin qu’ils puissent vous faire part de leurs craintes ou déconvenues. Rassurez-les quant au bon suivi des objectifs de développement de votre start-up ou entreprise innovante, et/ou de l’évolution du projet d’entreprise. Préférez autant que possible une solution amiable pour tenter de sortir d’une période de défiance.
Enfin, n’hésitez pas à faire appel à un tiers associé afin de jouer le rôle de médiateur entre les deux parties.
Encourager une collaboration stratégique et financière pérenne
Face aux aléas propres à la vie d’une société, l’entrepreneur et l’investisseur doivent agir main dans la main. Plus qu’un simple financeur, l’investisseur peut endosser un rôle de conseil dans le cadre de comités stratégiques, ce qui va considérablement renforcer la relation qui le lie aux associés fondateurs.
La transparence et le respect mutuel sont des facteurs essentiels pour la construction d’un partenariat financier pérenne entre fondateur et investisseur.